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OUISTREHAM d'Emmanuel Carrère

Une prise de conscience de la crise des classes.


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Marianne, une écrivaine d’un milieu aisé, se lance dans une expérience sociale étourdissante : comprendre les problèmes économiques qui gangrènent la société. Pour cela, elle décide de jouer les caméléons ethnologues, de faire une enquête de terrain où elle substitue sa vie plantureuse avec celle d’une femme au foyer qui doit recommencer sa vie après avoir quitté son riche mari.


Elle passe (volontairement) du côté des « pauvres ». Sans argent, sans voiture, sans vie professionnelle, elle va tenter de trouver un travail dans ces conditions. Une épreuve éprouvante qui la poussera à bout, moralement comme physiquement. Ayant connaissance de la supercherie, le spectateur se trouve dans une position inconfortable. Il est coincé entre ses sentiments d’empathie et sa propre morale (bonne conscience) pendant tout le film. La question qui taraude le spectateur reste sans réponse tout au long du film :


« Est-ce bien moral de vouloir tester la vie d’une femme de ménage juste pour écrire un livre, sous prétexte de vouloir aider ? ».

Après un rendez-vous chez Pôle Emploi (nom non cité), on la « diagnostic » apte à devenir agent d’entretien. C’est en suivant cette voie qu’elle va entrer en contact avec le milieu social qu’elle recherche. Comme le dit la conseillère de chez Pôle Emploi, qui a découvert la tromperie de Marianne, l’écrivaine va pouvoir quitter cette vie laborieuse quand l’envie lui chantera alors que les gens qui vivent (survivent) vraiment cette situation, sont coincés à durée indéterminée, peut-être même à vie, dans ce bourbier économique et administratif.


Est-ce bien moral de vouloir tester la vie d’une femme de ménage juste pour écrire un livre, sous prétexte de vouloir aider ?


Ce livre peut avoir une fonction dénonciatrice et donc peut mettre en lumière une classe sociale opacifié par la société capitaliste qui ne s’intéresse qu’aux « riches » mais qui sait très bien utiliser le bénéfices des « pauvres » en leur donnant assez pour vivre mais pas assez pour grimper l’échelle sociale. Ce scénario rappelle vaguement l’époque où Marie-Antoinette, reine de France, s’amusait à se rendre en campagne avec sa cour, vêtue comme une « bergère », pour vivre sobrement le temps d’une petite semaine en gardant trois montons. Evidemment, elle ne prenait pas en compte, dans son jeu de comédie, les véritables tâches des paysans. Dans ce film, Marianne souhaite s’abaisser pour aider la classe démunie. Mais cette classe a-t-elle vraiment envie d’avoir pour porte-parole, une femme issue d’un milieu aisée qui a simplement vécu la pauvreté sur une courte durée ? Les seuls personnes légitiment de parler d'un problème sont-ils forcément ceux qui les vivent ? C’est tout l’enjeu du film.


Juliette Binoche interprète ce rôle avec un réalisme déchirant. Les rides et les traits de fatigue qui commencent à habiter son visage, au fur et à mesure que son expérience avance, laisse le spectateur inquiet de la santé de la protagoniste et témoigne de la violence de ce travail.


La contraste social est à son apogée quand Marianne rejoint l’équipe de ménage du cargo qui emmène les voyageurs de France en Angleterre. Ici, les client.e.s du bateau, ne doivent même pas voir les équipes de ménage, comme lorsque l’on cache les déchets des humains, au loin des villes pour éviter de les avoir sous le nez sans savoir qu’en faire… Cette méthode sert à éviter de se poser des questions. Ici aussi, on préfère cacher le problème loin des yeux. Les conditions de travail de l’équipe de ménage sont affligeantes et les directives sont comparable à un marathon :

« Quatre minutes par chambre, une centaine de chambres à nettoyer avant l’arrivée des voyageurs. Ce rythme aliénant nous montre une réalité monstrueuse et révoltante. . ».

Le choix de casting des agents de propreté nous permet de réellement saisir les détails des difficultés de travail, en filmant non pas des comédien.ne.s, mais de vrai.e.s agents de propreté. Mais c’est la relation qu’entretient Marianne avec ses nouvelles amies, femmes de ménage, qui vient saisir le cœur du spectateur. La fin surprenante, laisse paraitre le point de vue du réalisateur qui réalise ce film dont le scénario est inspirée d’une histoire vraie. Pour lui, les classes sociales sont définies dans la tête de Marianne. Malgré tout son investissement, elle ne saura pas maintenir son amitié avec les deux « simples » femmes de ménage à cause des trop nombreuses différences qui les séparent.


Critique de Lorenzo VIALE



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